La Machine se décrit comme une formation musicale à effectif hors de l’ordinaire dédiée à la création et à la recherche de répertoires inconnus en musique contemporaine. En effet, un tel instrumentarium (harpe, percussion, piano, contrebasse, saxophones, guitare) oblige à la recherche d’oeuvres variées et par conséquent peu jouées à Montréal, en plus d’inciter à faire diverses commandes. On pourra entendre l’ensemble jouer un programme regroupant des compositeurs sud-américains le 1er avril à 20h à la Sala Rossa.
Pour ce programme, le chef d’orchestre Christian Gort se joindra à l’ensemble. C’est autour d’une proposition de Daniel Añez Garcia, pianiste de l’ensemble et colombien d’origine, que la programmation musicale de la soirée s’est construite. Il va sans dire que l’interprète a une excellente connaissance du répertoire contemporain de cette partie de l’hémisphère sud mais il a, en plus, durant ces années de maîtrise et de doctorat, travaillé en profondeur plusieurs œuvres pour piano issus du répertoire d’Amérique latine. Tout cela n’étant pas qu’une question de simples connivences avec ses origines, Anez Garcia a réfléchi et considéré certaines thématiques propres à ces musiques. Entre autres, la question d’un colonialisme culturel, toujours présent et entretenu par un institutionnalisme (autoritaire), est développée non seulement dans divers écrits mais jusque dans les œuvres de compositeurs tels que Coriún Aharonián, Rodolfo Acosta et Graciela Paraskevaidis. C’est jusqu’au cœur de l’écriture instrumentale et électroacoustique que l’on retrouve les traces d’un engagement, et dans des musiques voulant faire fi des canons esthétiques établis pour pouvoir exprimer réellement une culture propre et, métaphoriquement, sa construction. Il serait particulièrement intéressant de se poser ce genre de questions, ici, maintenant, à Montréal.
Voici, quelques mots sur les œuvres au programme, dont trois sont des commandes de La Machine :
Rodolfo Acosta : Verdaderos negativos
Son titre réfère au phénomène des « Faux positifs ». Il s’agit du nom donnés aux civils innocents assassinés par l’armée nationale colombienne en 2008. On cherchait alors à faire passer ces innocents pour des guérilleros morts au combat, tout cela dans le but de gonfler certains résultats. On peut aborder cette oeuvre comme étant une réplique artistique à ces évènements. L’œuvre est à instrumentation variable et consiste en divers petits modules à répéter un nombre de fois à déterminer par l’ensemble. Il semble être surtout question d’organiser des forces brutes à l’aide d’indications simples : quelques nuances (particulièrement ff), des profils mélodiques accompagnés d’indications sur le registre de l’instrument où il faut jouer, et le type de rythme, par moment périodique et par moment instable.
Le résultat prend la forme d’une masse instrumentale parfois chaotique, par moment très ordonnée, d’une opposition entre la régularité militaire et l’instabilité d’une foule en rogne.
Daniel Leguizamon : Septeto*
Étrange minimalisme. Pas le minimalisme américain, ni Anglais. Le terme, ici, n’est surtout pas réducteur. De manière surprenante, Leguizamon parvient à créer une musique toujours changeante avec très peu de matériaux. Le moindre geste résonne comme une sorte de constellation sonore éthérée. Et toutes ces subtiles résonances étirent le temps. Le narratif disparait pour faire place à l’écoute de divers jeux de timbres.
Camilo Mendez San Juan : Mechanical Resonance III, Incandescent Resonance*
Contrairement aux précédentes, cette œuvre affiche une écriture extrêmement précise. En partant de certains multiphoniques du saxophone, le compositeur les prolonge par des résonances orchestrées. C’est-à-dire, comme son titre l’indique, que l’ensemble devient une sorte de méta-instrument par une « mécanique » instrumentale. Les attaques et les sons tenus se propagent aux différents instruments de l’ensemble. Toutes les finesses de l’orchestration deviennent intéressantes du fait que ces résonances se transmettent de manière quasi imperceptible par un jeu de mimétisme rendu possible grâce à l’utilisation des différentes techniques de jeu propre à chacun des instruments.
Ana Dall’Ara Majek : Échos de l’invisible*
Voici ce qu’en dit la compositrice :
Les Echos de l’invisible est une pièce qui joue avec l’infime, le quasi imperceptible. La base de travail s’est réalisée à partir des enregistrements de petits objets qui chutent en se fracassant sur des obstacles. Chaque éclat, chaque changement d’état ou déplacement d’un milieu à un autre, a ensuite été traduit musicalement. Dans sa structure générale, la pièce illustre donc le parcours mouvementé d’un objet rebondissant contre différentes surfaces, son plongeon dans l’eau et sa lente immersion vers un fond encore semé d’embûches. À un degré plus subtil, la pièce explore un jeu de séquences entre des types de résonances (naturelles, entretenues, accidentées, pures…) qui se renouvèlent au sein d’un schéma rythmique macroscopique. On peut le penser comme une « danse de résonances ». Enfin, l’écho est l’idée directrice de l’oeuvre: il s’agit de l’ensemble des émergences imprévues qui naissent de la résonance, telle l’existence qui surgit du néant… Les compositeurs Leguizamon, Mendez San Juan et Dall’Ara Majek seront présents à ce concert donné le dimanche 1er avril 2012 à 20h00 à la Sala Rossa.
*-création,
La Machine se décrit comme une formation musicale à effectif hors de l’ordinaire dédiée à la création et à la recherche de répertoires inconnus en musique contemporaine. En effet, un tel instrumentarium (harpe, percussion, piano, contrebasse, saxophones, guitare) oblige à la recherche d’oeuvres variées et par conséquent peu jouées à Montréal, en plus d’inciter à faire diverses commandes. On pourra entendre l’ensemble jouer un programme regroupant des compositeurs sud-américains le 1er avril à 20h à la Sala Rossa.
Pour ce programme, le chef d’orchestre Christian Gort se joindra à l’ensemble. C’est autour d’une proposition de Daniel Añez Garcia, pianiste de l’ensemble et colombien d’origine, que la programmation musicale de la soirée s’est construite. Il va sans dire que l’interprète a une excellente connaissance du répertoire contemporain de cette partie de l’hémisphère sud mais il a, en plus, durant ces années de maîtrise et de doctorat, travaillé en profondeur plusieurs œuvres pour piano issus du répertoire d’Amérique latine. Tout cela n’étant pas qu’une question de simples connivences avec ses origines, Anez Garcia a réfléchi et considéré certaines thématiques propres à ces musiques. Entre autres, la question d’un colonialisme culturel, toujours présent et entretenu par un institutionnalisme (autoritaire), est développée non seulement dans divers écrits mais jusque dans les œuvres de compositeurs tels que Coriún Aharonián, Rodolfo Acosta et Graciela Paraskevaidis. C’est jusqu’au cœur de l’écriture instrumentale et électroacoustique que l’on retrouve les traces d’un engagement, et dans des musiques voulant faire fi des canons esthétiques établis pour pouvoir exprimer réellement une culture propre et, métaphoriquement, sa construction. Il serait particulièrement intéressant de se poser ce genre de questions, ici, maintenant, à Montréal.
Voici, quelques mots sur les œuvres au programme, dont trois sont des commandes de La Machine :
Rodolfo Acosta : Verdaderos negativos
Son titre réfère au phénomène des « Faux positifs ». Il s’agit du nom donnés aux civils innocents assassinés par l’armée nationale colombienne en 2008. On cherchait alors à faire passer ces innocents pour des guérilleros morts au combat, tout cela dans le but de gonfler certains résultats. On peut aborder cette oeuvre comme étant une réplique artistique à ces évènements. L’œuvre est à instrumentation variable et consiste en divers petits modules à répéter un nombre de fois à déterminer par l’ensemble. Il semble être surtout question d’organiser des forces brutes à l’aide d’indications simples : quelques nuances (particulièrement ff), des profils mélodiques accompagnés d’indications sur le registre de l’instrument où il faut jouer, et le type de rythme, par moment périodique et par moment instable.
Le résultat prend la forme d’une masse instrumentale parfois chaotique, par moment très ordonnée, d’une opposition entre la régularité militaire et l’instabilité d’une foule en rogne.
Daniel Leguizamon : Septeto*
Étrange minimalisme. Pas le minimalisme américain, ni Anglais. Le terme, ici, n’est surtout pas réducteur. De manière surprenante, Leguizamon parvient à créer une musique toujours changeante avec très peu de matériaux. Le moindre geste résonne comme une sorte de constellation sonore éthérée. Et toutes ces subtiles résonances étirent le temps. Le narratif disparait pour faire place à l’écoute de divers jeux de timbres.
Camilo Mendez San Juan : Mechanical Resonance III, Incandescent Resonance*
Contrairement aux précédentes, cette œuvre affiche une écriture extrêmement précise. En partant de certains multiphoniques du saxophone, le compositeur les prolonge par des résonances orchestrées. C’est-à-dire, comme son titre l’indique, que l’ensemble devient une sorte de méta-instrument par une « mécanique » instrumentale. Les attaques et les sons tenus se propagent aux différents instruments de l’ensemble. Toutes les finesses de l’orchestration deviennent intéressantes du fait que ces résonances se transmettent de manière quasi imperceptible par un jeu de mimétisme rendu possible grâce à l’utilisation des différentes techniques de jeu propre à chacun des instruments.
Ana Dall’Ara Majek : Échos de l’invisible*
Voici ce qu’en dit la compositrice :
Les Echos de l’invisible est une pièce qui joue avec l’infime, le quasi imperceptible. La base de travail s’est réalisée à partir des enregistrements de petits objets qui chutent en se fracassant sur des obstacles. Chaque éclat, chaque changement d’état ou déplacement d’un milieu à un autre, a ensuite été traduit musicalement. Dans sa structure générale, la pièce illustre donc le parcours mouvementé d’un objet rebondissant contre différentes surfaces, son plongeon dans l’eau et sa lente immersion vers un fond encore semé d’embûches. À un degré plus subtil, la pièce explore un jeu de séquences entre des types de résonances (naturelles, entretenues, accidentées, pures…) qui se renouvèlent au sein d’un schéma rythmique macroscopique. On peut le penser comme une « danse de résonances ». Enfin, l’écho est l’idée directrice de l’oeuvre: il s’agit de l’ensemble des émergences imprévues qui naissent de la résonance, telle l’existence qui surgit du néant… Les compositeurs Leguizamon, Mendez San Juan et Dall’Ara Majek seront présents à ce concert donné le dimanche 1er avril 2012 à 20h00 à la Sala Rossa.
*-création,